Emmanuel Macron s’est exprimé mercredi soir pour alerter sur la « gravité » de la situation sécuritaire en Europe et l’urgence de renforcer les capacités de défense du continent.
Face à une Russie qu’il qualifie de : « de plus en plus agressive », il a déclaré que « la guerre en Ukraine dure maintenant depuis plus de trois ans. Nous avons, dès le premier jour, décidé de soutenir l’Ukraine et de sanctionner la Russie. Et nous avons bien fait. »
Le Président français a dénoncé une « menace » qui dépasse le cadre ukrainien : « La Russie du président Poutine viole nos frontières pour assassiner des opposants, manipule les élections en Roumanie, en Moldavie, organise des attaques numériques contre nos hôpitaux pour en bloquer le fonctionnement. Elle tente de manipuler nos opinions avec des mensonges diffusés sur les réseaux sociaux. »
Il a également alerté sur la militarisation croissante du pays : « La Russie continue de se réarmer, dépensant plus de 40 % de son budget à cette fin. D’ici 2030, elle prévoit d’accroître encore son armée, d’avoir 300 000 soldats supplémentaires, 3 000 chars, 300 avions de chasse de plus. »
Face à cette menace grandissante, Macron a affirmé que l’Europe devait réagir avec fermeté : « Qui peut donc croire, dans ce contexte, que la Russie d’aujourd’hui s’arrêtera à l’Ukraine ? La Russie est devenue, au moment où je vous parle et pour les années à venir, une menace pour la France et pour l’Europe. »
– Soutien à l’Ukraine et option d’un déploiement européen
Le chef d’État français a insisté sur la nécessité d’une aide continue à l’Ukraine : « Nous devons continuer d’aider les Ukrainiens à résister, jusqu’à ce qu’ils puissent négocier avec la Russie une paix solide pour eux-mêmes et pour nous tous. » Il a cependant rejeté toute paix imposée par Moscou : « La paix ne peut pas être conclue à n’importe quel prix, sous le diktat russe. La paix ne peut pas être la capitulation de l’Ukraine. Elle ne peut pas être son effondrement. »
Évoquant les efforts diplomatiques français, il a rappelé : « C’est en ce sens que nous travaillons avec nos amis britanniques, allemands et plusieurs autres pays européens. » Il a également suggéré que « peut-être, un jour, des forces européennes seront déployées [en Ukraine], non pas pour se battre aujourd’hui, non pas sur la ligne de front, mais pour garantir le respect de la paix, une fois celle-ci signée. »
Dans cette optique, la France réunira dès la semaine prochaine à Paris les chefs d’état-major des pays souhaitant « prendre leurs responsabilités » en matière de défense européenne.
– Un tournant pour l’Europe de la défense
Emmanuel Macron a plaidé pour un renforcement des capacités militaires européennes et une augmentation des budgets de défense.
« Les États européens doivent, compte tenu de la menace russe, être capables de mieux se défendre et de dissuader toute nouvelle agression. », a-t-il soutenu.
Il a salué les annonces récentes de plusieurs pays : « L’Allemagne, la Pologne, le Danemark, les États baltes et nombre de nos partenaires ont annoncé des efforts inédits en matière de dépenses militaires. » Pour accompagner cette dynamique, il a indiqué que « les États membres pourront accroître leurs dépenses militaires sans que cela soit pris en compte dans leur déficit. »
Le Président français a insisté sur la nécessité pour l’Europe de développer sa propre industrie de défense : « Des financements communs massifs seront décidés pour acheter et produire sur le sol européen des munitions, des chars, des armes, des équipements parmi les plus innovants. »
Il a demandé à son gouvernement de veiller à ce que ces investissements « renforcent nos armées le plus rapidement possible et accélèrent la réindustrialisation dans toutes nos régions. »
– La dissuasion nucléaire au cœur du débat
Emmanuel Macron a également abordé la question de la dissuasion nucléaire française et son rôle dans la sécurité européenne.
Il a affirmé que « notre dissuasion nucléaire nous protège. Elle est complète, souveraine, française de bout en bout. » Il a cependant répondu à « l’appel historique du futur chancelier allemand » en ouvrant le débat sur « la protection par notre dissuasion de nos alliés du continent européen. »
Il a tenu à clarifier que « quoi qu’il arrive, la décision a toujours été et restera entre les mains du président de la République, chef des armées. »
– Les tensions commerciales avec les États-Unis
Outre la question sécuritaire, Emmanuel Macron a également critiqué la politique protectionniste américaine, notamment les tarifs douaniers imposés par Washington : « Les États-Unis viennent de confirmer ces mesures contre le Canada et le Mexique, et pourraient bientôt en faire de même contre l’Europe. Cette décision incompréhensible, tant pour l’économie américaine que pour la nôtre, aura des conséquences sur certaines de nos filières. »
Il a annoncé que la France et l’Europe « prépareront la riposte » tout en poursuivant un dialogue avec Washington : « J’espère convaincre et en dissuader le président des États-Unis d’Amérique. »
– Un appel au sursaut national et européen
Concluant son allocution sur un ton grave, Emmanuel Macron a exhorté les Français et les Européens à faire face aux défis à venir avec lucidité et détermination : « Le moment exige des décisions sans précédent depuis bien des décennies. » Il a invité « toutes les forces politiques, économiques et syndicales du pays » à s’adapter à cette nouvelle réalité.
Refusant tout fatalisme, il a affirmé : « Il ne faut céder à aucun excès, ni l’excès des va-t-en-guerre, ni l’excès des défaitistes. La France ne suivra qu’un cap : celui de la volonté pour la paix et la liberté. »
Appelant à une Europe plus forte et unie, il a conclu : « Nous devons agir en Européens, et déterminés à nous protéger. C’est pourquoi la patrie a besoin de vous, de votre engagement. »
Et de terminer par une déclaration solennelle : « Alors, nous ferons face ensemble. Vive la République, vive la France. »
Cette prise de parole du Président français marque un virage dans le discours présidentiel, qui insiste désormais sur la nécessité pour l’Europe de se défendre seule si besoin. Entre la guerre en Ukraine, la montée des tensions avec Moscou et l’incertitude liée aux États-Unis de Donald Trump, Macron prépare l’opinion publique à une Europe de la défense plus autonome.
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