« De la transition de 2014-2015 à la transition de 2022 : leçons et perspectives pour une transition propice à une consolidation de la démocratie » : c’est sous ce thème que le Centre pour la Gouvernance Démocratique (CGD), en partenariat avec l’ONG Diakonia et le NDI (National Democratic Institute), a organisé à Ouagadougou ce 12 avril 2022, un dialogue démocratique. Cette activité s’inscrit dans le cadre de la dynamique de réflexions autour de la feuille de route de la transition mise en place au Burkina.
Pour analyser le thème, trois panelistes se sont dévolus à la tâche, avec le Professeur Serge Théophile Balima à la modération. Il s’agit de l’enseignant-chercheur en science politique à l’Université Thomas Sankara, Dr Abdoul Karim Saïdou, qui a décortiqué les acquis et les faiblesses de la transition de 2014-2015. Dr Siaka Coulibaly, analyste politique, lui, s’est appesanti sur les défis qui se présentent à cette transition de 2022. Martine Yabré, défenseur des droits humains, coordonnatrice du Cadre de concertation des organisations intervenant sur le genre et la participation citoyenne des femmes au Burkina, a eu la lourde tâche d’aborder les réformes à engager, pour plus de sécurité et de cohésion sociale.

Pour le Docteur Abdoul Karim Saïdou, il y a eu des acquis dans la transition de 2015, notamment en matière de productions législatives et de réformes importantes dans le cadre de la bonne gouvernance. Il a également souligné des insuffisances, comme la non-inclusivité des élections et un manque de coordination entre les organes de la transition. «Pour la transition qui vient de s’enclencher, c’est le lieu aujourd’hui de voir dans quelle mesure on peut capitaliser sur l’expérience de 2015. Et surtout éviter les erreurs qui ont été commises, afin de faire en sorte que cette transition soit le début de la refondation d’une véritable société », a-t-il déclaré. L’enseignement chercheur a également suggéré à la transition de rester concentrée sur ses priorités, pour ne pas disperser ses énergies, et de faire en sorte que les forces vives de la nation puissent s’engager dans la reconquête du territoire national, afin de préparer le retour à l’ordre constitutionnel.
C’est l’inefficacité de l’État qui a généré toutes ces crises au Burkina Faso
Siaka Coulibaly
Sur la situation politique actuelle et l’identification des défis de l’heure, Professeur Siaka Coulibaly a attiré l’attention des acteurs sur la périlleuse question de la refondation de l’État burkinabè. Pour lui, cette refondation constitue le principal défi de cette transition. « L’insécurité et les tensions politiques sont des problèmes de terminaison de l’action de l’État. C’est l’inefficacité de l’État qui a généré toutes ces crises au Burkina Faso…Une fois que l’Etat fonctionne normalement, tous les déficits qui sont constatés seront résorbés, a-t-il indiqué.

Il a d’ailleurs salué l’identification de ce défi par les autorités de la transition dans leur agenda ( la refondation de l’État figure dans le point stratégique 3 de la feuille de route présenté par le Premier Ministre).
Il y’a trop de cadres, trop de dépenses. C’est un peu trop lourd pour un pays comme le nôtre, qui a d’autres priorités
Martine Yabré
En ce qui concerne les réformes à engager, Martine Yabré a surtout insisté sur les mécanismes déjà en place, et qui sont peu exploités. Elle a invité à une revisite des réformes qui existent déjà. « Tout est vraiment disponible, il faut exploiter ce qui est déjà là. A la longue, je crois que c’est nous-mêmes qui gaspillons les ressources… Il y a trop de cadres, trop de dépenses. C’est un peu trop lourd pour un pays comme le nôtre, qui a d’autres priorités », a-t-elle interpellé.

Pour illustrer ses propos sur le cas de la cohésion sociale, Madame Yabré a mentionné quelques instruments tels que le rapport du Collège de sages de 1999, les travaux du Conseil Consultatif sur les Réformes Politiques (CCRP) de 2011, les réflexions de la Commission de Réconciliation Nationale et des Réformes (CRNR) de 2015, les travaux du Haut Conseil pour la Réconciliation et l’Unité Nationale (HCRUN) en 2021 et les travaux du Ministère de la Réconciliation Nationale et de la Cohésion Sociale en janvier 2022.